vendredi 14 mars 2014

A la rencontre d’un citoyen modèle

« Tout ce qui m’intéresse, c’est que le lieu soit propre », ces propos sont de Karim Sylla, technicien de surface. Nez aquilin, teint un peu clair, le chef de dépôt d’ordures de Touba Ouakam n’hésite pas à utiliser ses propres moyens pour soulager les riverains des immondices. D’un abord facile, il est, selon ses proches, nerveux mais très généreux.


 Bouche toujours souriante sur son visage calme et radieux et son énergie « débordante » renseignent à suffisance sur l’amour qu’il a pour son travail. Sa générosité légendaire  dans l’effort l’amène souvent, dés qu’il aperçoit des ménagères dandiner sous l’effet de la charge de leurs corbeilles, à se porter vers  elles pour les soulager. « J’aime l’ordre et la rigueur dans le travail. Je ne sais pas tricher, je l’ai dans le sang. C’est une éducation que j’ai reçue de mon père qui était militaire», révèle ce technicien de surface. Oumy Kalssoum Sy et Houlèye Diallo, ses amies de longue date rencontrées chez lui, confirment cet amour qu’il a pour son travail .Elles soutiennent qu’il travaille même les dimanches et les jours de fêtes. « Dés fois, il reste seul au jusqu’à 3 heures du matin, malgré la fraîcheur, pour dissuader ceux qui seraient tenter de déposer leurs ordures par terre », ajoute Oumy avec émotion.


Né le 24 mai 1978, le chef de dépôt d’ordures de Ouakam est le cadet d’une fratrie de huit enfants. De mère bambara et de père peulh, Karim Sylla parle Ouolof et français. Il a fait ses études élémentaires entre Stella Mariste et l’école Mamadou Diop de Ouakam. Avec les grèves répétitives dans l’école publique, son père l’envoie aux cours privés Bouba Ndiaye Sanb où il étudie jusqu’en classe de 4eme. En 1994, il  décide d’abandonner les études. Pour meubler son temps libre, il initie cette même année, des séances de Set- sétal dans son quartier de Touba Ouakam. Mélancolique, le natif de Pikine aux cheveux roux se rappelle encore, sourire au coin, de ces moments. « Les habitants du quartier appréciaient beaucoup ce que je faisais. Certains me donnaient des pièces de monnaie pour m’encourager. J’arrivais donc à satisfaire mes besoins », explique-t-il.


Cette initiative le mène à AMA- Sénégal où il est recruté le 1er janvier 2004. Avec la rupture du contrat entre cette société de nettoiement et l’Etat du Sénégal  le 22 juillet 2006, il se retrouve au chômage. Il en parle avec amertume que laisse transparaître sa voix étreinte par l’émotion. Il ne s’est pas tourné longtemps le pouce. Car il est recruté la même année à Entente KADAKAR. En septembre 2011, le père de Fatou Sylla devient le chef de dépôt situé au terrain Monténary en face du camp Paul Lapeyre de Ouakam.  
Le regard que certains sénégalais portent sur les techniciens de surface ne gêne pas Karim Sylla. Selon lui, «il n’y a pas de son métier ». « Avec mon travail, j’arrive à entretenir mes enfants et à aider ma mère. Je n’ai vraiment rien à envier à qui que ce soit », ajoute-t-il avec une voix ferme.


Son salaire contraste avec la charge des ordures et de celle de trois  « bouts de bois de Dieu » qui pèsent sur ses  courtes épaules. Selon ses voisins, Karim est un bon père de famille. Depuis 2008, il s’occupe seul de ses enfants. Selon Oumy Kalssoum Sy, il est un père attentionné qui s’occupe bien de l’éducation et du bien être de ses enfants. « Il est généreux avec tout le monde, c’est pourquoi il n’épargne jamais. C’est l’un de ses défauts », révèle-t-elle.


Du haut de son mètre 85, Karim affiche toujours un regard serein qui inspire respect et confiance. De corpulence moyenne, Rimka, comme l’appellent  ses intimes, a un penchant pour les « gros biceps ». Il est un féru de lutte. Les nombreux posters des lutteurs Balla Gaye et Yékini accrochés au mur de son salon en est une parfaite illustration. Son plat préféré est le « mafé ». Le thé lui permet de  « lutter contre la solitude ».



Depuis six mois, Karim Sylla est chargé de l’information et de la sensibilisation du syndicat national des travailleurs du nettoiement à Ouakam. Eu égard à sa riche expérience, il nourrit l’ambition de devenir un jour le responsable national de ce syndicat.

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