Encore dans l'ombre, Tibou Diabaye rêve de devenir un artiste de renommée mondiale. Agé de
30 ans, ce jeune alpoular de teint noir et jovial pense déjà à un disque d’or.
Dans cet entretien, il revient entre
autres sur ses origines, ses premiers pas dans la musique, la préparation de
son premier album.
Pouvez-vous
vous présentez à nos lecteurs ?
Tibou Diabaye est un jeune griot né de parents peulhs. Je
suis originaire du fouta, précisément de Démét, un village historique situé
dans l’île amorphile (Département de Podor). Je suis artiste-musicien et
auteur-compositeur. J’ai toujours aimé l’art des griots que j’ai hérité de mes
parents qui sont très respectés dans notre localité. Mon arrière-grand-père
Demba Gawlel était le griot d’El hadj Oumar Tall. C’est dans cet environnement
que j’ai vécu depuis ma tendre enfance J’ai aussi fréquenté l’école nationale des arts où j’ai passé 5
années de formation. Depuis 2009 je travaille dure pour gagner ma place dans le
paysage musical du Sénégal.
Qu’est-ce
qui vous a poussé à faire la
musique ?
Je suis né artiste. Et
comme je l’ai dit, je suis né dans une famille de griots. Un griot est
naturellement un artiste. En plus, mon père est un grand griot. Il est connu
dans tout le fouta et en Mauritanie. Dés le bas âge, mes parents avaient détecté
en moi des talents. J’étais choyé par mon père avec qui j’ai sillonné presque
tout le fouta et la Mauritanie. Il m’amenait toujours avec lui lorsqu’il allait
rendre visite à ses amis. Il m’a appris l’art des griots. Lorsque j’avais 16
ans, je regroupais souvent mes amis chez moi ou sur la place du quartier pour chanter
et danser. Je jouais au « Bitikonguel »
(il affiche un sourire) (un instrument que nous fabriquions et qui est fait
d’un pot qui loge le bout d’un bâton arqué
sur lequel on attache une corde fine). Mais, c’est surtout mon
demi-frère Abou Diabaye qui était lui
aussi musicien qui m’a introduit dans le milieu de la musique. En 1999, il est revenu
chez nous avec son groupe et j’étais tout le temps avec eux. J’assistais à leurs
répétitions à l’occasion desquelles il me demandait de chanter. Ils ont commencé
à m’amener dans les veillées culturelles qu’ils organisaient dans le village.
Mon jeune âge faisait que mon père ne voulait pas que j’aille avec eux pour
chanter. A chaque fois que j’étais absent, le public me réclamait. J’étais
devenu le chouchou du public qui était impressionné par jeune âge. Mon père avait
fini par comprendre que j’avais la musique dans les « veines ».
Ainsi, je partais avec eux dans leurs tournées qu’ils effectuaient dans le
fouta et en Mauritanie. A la fin de leurs tournées, ils sont rentrés sur Dakar.
Je me suis senti vraiment seul. J’ai compris que j’étais né pour être musicien.
J’ai décidé de quitter mon village pour venir à Dakar. J’ai été hébergé par mon
oncle maternel au Sicap rue 10. Son
domicile était un lieu de fréquentation de musiciens tels que Baba Maal, Abou
Diouba, Guélel Sangott, Ngaari Laaw. Dés fois, mon oncle qui jouait à la
guitare m’invitait à chanter. C’est avec sa guitare que j’ai appris mes
premières notes. En 2004, ma mère qui se trouve en France m’a envoyé une
guitare (il en parle avec émotion). Ce soutien m’a réconforté dans mon vœu de
faire carrière dans la musique.
Vous
êtes entrain de préparer votre premier album. Quels sont les thèmes généraux
que vous y abordez ?
Dans l’album, je
développe des thèmes sur la culture poular, en particulier sur celle des
griots. J’ai revisité le fonds culturel peulh qui est très riche. Je parle
aussi des thèmes relatifs à l’émigration, à l’amour (il prend sa guitare et
commence à jouer quelques notes). Je rends également hommage à certains qui ont
fait de moi ce que je suis aujourd’hui.
.
Beaucoup
d’artistes-musiciens rencontrent d’énormes problèmes pour trouver un
producteur. Comment est-ce que vous avez trouvé des moyens pour la production
de votre album ?
C’est un opérateur
économique du nom d’Abdoulaye Elimane Dia qui a financé la production de l’album.
Il est aussi originaire de Démét comme moi. Nous sommes leurs griots et nos
deux pères étaient des amis. Nos deux familles sont très liées depuis fort
longtemps. Ces rapports sont encore très solides. Un jour, je me suis rendu
chez lui, je lui ai donné une maquette qu’il a écoutée et appréciée. Aussitôt
après, il a pris l’engagement de m’aider à produire un album (son téléphone
sonne. Il pinçait encore les cordes de sa guitare. Sa choriste décroche et
place l’appareil contre son oreille gauche et il entonne une chanson en
souriant). Il y a mis ses moyens et m’a dit qu’il n’attend rien en retour. J’en
profite pour le remercier pour sa générosité. Je signale que c’est quelqu'un qui est profondément enraciné dans sa culture.
Quand
est-ce qu’est prévue la sortie de votre album ?
L’album va sortir bientôt.
L’enregistrement et le mixage ont été déjà réalisés. Nous sommes entrain de
préparer un vidéo-clip. Le tournage va se faire la semaine prochaine. Ensuite,
il sera mis à la disposition des chaînes de télévision de la place pour la
promotion du produit. Et un mois après, nous le mettrons sur le marché.
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