« LUX MEA LEX », ces lettres que nous lisons tous les jours
à l’entrée de l’université, sur les frontons de nos départements, facultés et
unités de formation et de recherche, au dos de nos cartes d’étudiant, ne sont
pas de vains mots. Elles traduisent notre devise, celle de toute la communauté
universitaire. Elle signifie littéralement « la lumière est ma loi ».
Cette lumière doit nous guider dans tous nos comportements et actions de tous
les jours. Elle doit illuminer notre chemin. Aussi, ne doit-elle pas seulement
être circonscrite dans le périmètre universitaire, elle doit étendre ses
tentacules sur toute la société. Nous devons ainsi être des éclaireurs de notre
nation. Quelle que soit la situation, nous ne devrons point être guidés ni par
la violence ni par la passion, mais nous devrons toujours être inspirés par la
vérité et la sérénité scientifiques.
Pourquoi faisons-nous de la violence notre
seule armée pour exprimer notre désaccord sur certaines questions ? Sur celle relative à l’augmentation des frais
d’inscription, au lieu d’opposer un niet catégorique et de passer aux casses,
nous devons analyser avec responsabilité et retenue l’opportunité et le bien fondé de
cette mesure. En nous posant une question simple : quel serait l’impact de
cette mesure sur la qualité de l’enseignement supérieur ? A notre humble
avis, c’est cette qualité que nous devons mettre en avant, que nous devons
rechercher en permanence en connivence avec tous les acteurs de l’enseignement
supérieur. Car de cette qualité, dépendra notre compétitivité dans un marché de
travail mondialisé de plus en plus compétitif et qui exige l’excellence et la performance à quiconque veut s’y épanouir.
Nous avions été surpris d’entendre un camarade étudiant déclarer sur
un plateau de télévision que la qualité de l’enseignement supérieur n’incombe
qu’à l’Etat et qu’on ne devrait demander aux étudiants que de faire de bons
résultats. Ce que notre camarade a oublié c’est que sans le concours des
étudiants, l’Etat n’y arrivera jamais
seul. Et qu’on ne devrait plus accepter
que d’autres réfléchissent pour notre compte sans nous y associer. A ce niveau,
il faut saluer la démarche inclusive et participative du gouvernement qui nous
a associé dans le processus de réforme de l’enseignement supérieur. Nous avons
été représentés par nos camarades dans la concertation nationale sur l’avenir
de l’enseignement supérieur ainsi qu’au niveau du conseil présidentiel tenu à
cet effet. Il en est ainsi sorti plusieurs mesures transformées en décisions
exécutoires par les pouvoirs publics parmi lesquelles, l’écrasante majorité de
nos camarades, n’en a retenu que deux : l’augmentation des frais
d’inscription et la révision des critères d’obtention de bourse.
Par ailleurs, c’est un truisme que de dire que notre université s’ « étouffe » :
mauvais résultats, capacité d’accueil limitée, manque d’enseignants, problème
de logements, qualité des repas, manque de restaurants etc… Ces problèmes nous
les vivons au quotidien et nous nous en offusquons à tout bout de champ.
Devons-nous continuer à les subir ou devons-nous, avec les autres acteurs, nous
atteler résolument à les transformer ? A notre avis, nous devons, aux
niveaux personnel et collectif, jouer
notre partition dans l’œuvre de construction d’un système éducatif et
universitaire porté vers l’excellence qui est une
exigence républicaine. Nous devons cultiver une citoyenneté active et solidaire,
rompre d’avec celle passive qui consiste à subir, impuissants, les politiques
et décisions imaginées dans les bureaux de nos gouvernants. Nous devons changer
notre attitude qui consiste à attendre
tout de l’Etat. Nous devons certes être exigeants par rapport à eux, mais nous
devons au préalable nous imposer une rigueur et une discipline dictées par
l’amour de la patrie et l’esprit républicain. Car notre pays est à la croisée
des chemins ; il est aujourd’hui confronté, entres autres, au chômage, à
la cherté de la vie, aux inondations, à l’insécurité alimentaire. Nous sommes
justement interpellés par ces problèmes qui assaillent au quotidien nos
parents, nos frères et sœurs. En dépit de tous les obstacles auxquels nous
sommes confrontés, nous devons faire nôtre le culte de l’effort, de
persévérance, de performance et de l’excellence, car l’Etat a beaucoup investi
sur nous depuis que nous sommes tout petits. Cela nous devons toujours l’avoir
en tête toutes les fois que nous serions tentés de paralyser la mobilité de nos
concitoyens, de brûler ou de mettre à sac les biens publics que les générations
passées ont édifiés au prix d énormes sacrifices. Nous ne devons faire
moins celles-ci, car nous avons une obligation morale de rendre compte aux
générations futures de ce que nous avons fait du legs des anciens.
Pour ce faire, il est temps
pour nous de rappeler à certains de nos camarades que le diplôme de
baccalauréat n’est pas un « permis à tout faire ». Ils pensent
que la loi sur les libertés et franchises universitaires fait de l’espace
universitaire une « zone de non-droit ». Qu’ils se
détrompent ! En effet, le principe de l’inviolabilité de l’espace universitaire n’est pas
un « paravent » qui leur protégerait des « foudres »
de la loi. Au non du principe de territorialité de la loi, il ne saurait y
avoir un endroit dans le pays où le droit ne s’appliquerait pas, une portion du
territoire où le désordre et la violence seraient bénis. En définitive, la loi
n°94-79 du 24 novembre 1994 sur les libertés et franchises universitaires ne
saurait parrainer un havre pour
ces étudiants qui, même quand la tête leur fait mal, organisent des
casses, barrent l’avenue Cheikh Anta Diop, brûlent des pneus, séquestrent les
autorités de l’université, intimident les enseignants, agressent leurs
camarades au moment des élections des amicales et des codifications, paralysent
le système en arrêtant les cours. Ce sont les auteurs même de ces actes qui
avancent l’idée selon laquelle, les forces de l’ordre n’ont pas le droit de
mettre le pied dans l’espace universitaire. Ils ne savent même pas que ce sont
eux qui violent en permanence l’esprit de cette loi qui protège la liberté dans la production
intellectuelle et scientifique contre toutes formes d’entraves. Et tout cela,
c’est un groupuscule d’étudiants qui le fait au nom de tous les étudiants.
Tenez-vous bien chers camarades, il serait établi que 70% des
étudiants sortent des universités sans diplômes alors que l’Etat investi des milliards sur eux. Quid de ceux qui
sortent avec des diplômes? La majeure partie « fait carrière dans le
chômage », car nos diplômes sont souvent en déphasage avec les besoins du
marché du travail. C’est donc de l’argent public « jeté par la fenêtre »,
mais aussi de jeunes sénégalais qui perdent des années de salaires. Devons-nous
accepter que cela continue ? Nous ne le pensons pas. Nous devons nous
arrêter un instant et réfléchir sur notre contribution pour relever les défis
auxquels l’université sénégalaise est confrontée. Certes les nouveaux montants des frais d’inscription sont un peu
élevés, ils sont quand bien même raisonnables eu égard à l’ampleur des besoins de financement de nos
universités. C’est ainsi que nous devons accepter de consentir un sacrifice pour nous- mêmes,
pour nos jeunes frères qui arriveront et pour le devenir de notre nation. Nous
devons, main dans la main, nous unir pour aider l’Etat à relever les défis, car
avant tout l’Etat c’est nous. Ainsi, nous devons acceptons, en dépit de la
conjoncture qui prévaut dans notre pays,
de faire un effort pour participer au financement de notre enseignement
supérieur. Acceptons de payer les nouveaux montants pour participer à
l’équipement de nos salles de travaux pratiques et travaux dirigés, à la
construction de nouveaux amphis, à la modernisation des offres de formation et
au recrutement d’un personnel enseignant suffisant. Après ce sacrifice ; exigeons de
meilleures conditions d’études et la qualité des formations pour notre
insertion future dans le monde du travail.
« Si l’éducation coûte
chère, essayez l’ignorance » disait Abraham Lincoln. Ce dernier nous
apprend que quel que soit le coût de l’éducation, l’ignorance coûte plus chère
à une nation. Seules une éducation et une formation de qualité nous rendront
libres et autonomes. Nous en appelons donc à tous nos camarades étudiants de
toutes les universités, de tous les centres universitaires régionaux ; de
toutes les écoles et de tous les instituts, d’étudier la question de
l’augmentation des frais d’inscription avec un esprit dépouillé de toute
passion pour en saisir le bien fondé, mais aussi en mesurer l’ impact sur nos conditions
d’études. C’est de cette manière seulement que nous devons nous comporter pour
améliorer notre image déjà entamée. L’esprit doit dominer la matière. Donc
chers camarades démontrons à certains de nos concitoyens que notre devise n’est
pas « la force est ma loi », mais « la lumière est ma
loi ». Chantons en chœur « LUX
MEA LEX »